Un smartphone pour détecter les troubles du rythme cardiaque ? Seuls quelques applicatifs sont validés.


De nombreuses applications permettent de mesurer sa fréquence cardiaque avec son Smartphone. Mais, sauf rares exceptions avec équipement supplémentaire, il ne faut pas les utiliser pour détecter des arythmies. Explications

Les troubles du rythme cardiaques (arythmies) se traduisent notamment par des battements irréguliers du cœur. Ces arythmies peuvent se traduire par des malaises, ou bien la personne peut ne pas s’en apercevoir. Il peut s’agir de troubles bénins (comme les simples extrasystoles auriculaires) ou de troubles graves menaçant la santé. Les troubles du rythme sont des pathologies fréquentes avec la particularité de se manifester souvent de façon intermittente, autrement dit existant par périodes et non pas de façon permanente. Cette intermittence explique que le diagnostic n’est pas toujours facile à faire ; par exemple on peut avoir un cœur battant à un rythme normal et régulier au moment de la consultation chez le médecin, puis anormal une fois de retour au domicile. Dans ces cas, le diagnostic passe par l’enregistrement des battements cardiaques sur une longue période (enregistrement ambulatoire). Pour faire le diagnostic le cardiologue dispose d’appareils professionnels (on parle de Holter cardiaque). Mais le grand public peut-il utiliser son smartphone pour détecter un trouble du rythme cardiaque ? C’est que prétendent parfois les multiples applications smartphones qui mesure la fréquence cardiaque. Est-ce sérieux ? Dans un article publié par la Revue Médicale Suisse, le Professeur Haran Burri et le Docteur Cheryl Teres font le point sur deux modes techniques, l’un au moyen de l’appareil photo du Smartphone, l’autre par la connexion d’électrodes au Smartphone (1).

Analyse par l’intermédiaire de l’appareil photo et la lumière LED du Smartphone : pas assez fiable

En posant le doigt sur l’objectif photo de son Smartphone et en téléchargeant une application dédiée à l’étude de la fréquence cardiaque on obtient un chiffre et aussi une courbe animée (comme par exemple, Cardiograph fait par MacroPinch Ltd, Sofia, Bulgarie). Le Smartphone se trouve ainsi doté d’une fonction de pulsomètre et le signal est affiché sous forme d’un « pseudo électrocardiogramme ».  Mais attention il ne s’agit que des indications du passage du sang au niveau alors qu’aucun signal électrique n’est enregistré. Cela ne reflète donc pas l’activité électrique du coeur, celle que l’on cherche à analyser en cas de troubles du rythme cardiaque. Ces applications sont donc peu fiables. De plus des artéfacts liés au mouvement du doigt appliqué contre la source de lecture peuvent être faussement interprétés comme des arythmies. Par ailleurs, des extrasystoles, ne générant pas un pouls efficace, ne seront pas visualisées par cette méthode. Au total, il ne faut pas utiliser ces applicatifs dans un but médical.

Analyse avec des électrodes connectées au smartphone : certaines applications sont validées

D’autres possibilités plus évoluées consistent en des dispositifs incorporant une paire d’électrodes qui peuvent être couplées aux téléphones (comme un boitier) afin d’enregistrer un ECG d’une dérivation (ressemblant à DI). Selon Haran Burri et Cheryl Teres ( Mai 2015) deux dispositifs sont disponibles pour le grand public : l’AliveCor® (AliveCor, San Francisco, Etats-Unis) pour iPhone/Android et l’ECG Check (Cardiac Designs®, Round Rock, Etats-Unis) pour l’iPhone. Le dispositif AliveCor® a été validé dans le cadre de la détection d’une fibrillation auriculaire et approuvé par la Food and Drug Administration (FDA), organisme publique nord américain qui fait référence. Il enregistre un tracé de qualité suffisante pour permettre le diagnostic d’une fibrillation auriculaire (sensibilité 98%, spécificité 97%, précision globale de 97%). Son utilisation a également été étudiée dans le dépistage de la fibrillation auriculaire. Finalement, des dispositifs externes, comportant des électrodes peuvent être connectés au Smartphone via Bluetooth afin de transmettre les données sur une plateforme web. Des exemples de ce type de dispositif sont l’eMotion ECG® (Mega Electronics Ltd, Kuopio, Finlande) et le CardioSecur® (Personal MedSystems GmbH, Berlin, Allemagne). Cette technologie est certes intéressante pour dépister des arythmies, mais le rendement diagnostique va dépendre de l’interprétation des données. Les auteurs n’ont pas trouvé (mai 2015) d’étude de validation pour ces dispositifs. Dossier à suivre.


Références
Source : Haran Burri et Cheryl Teres (Unité d’électrophysiologie. Service de Cardiologie HUG, Genève. Suisse)..Nouveaux outils pour le diagnostic d’arythmies. Revue Médicale Suisse. www.revmed.ch  27 mai 2015 (Rédaction dr. N. Postel-Vinay pour automesure.com).

Automesure.com © – Rédaction Juillet 2015