Cigarette électronique : un essai randomisé contrôlé l’envisage comme moyen de sevrage

La e-cigarette peut t-elle passer du statut de gadget à celui de médicament ?

Les résultats d’un essai publié dans The Lancet en 2013 pourrait nous faire changer d’optique.

Une équipe néozélandaise (Auckland) s’est demandé si la cigarette électronique avec des cartouches contenant de la nicotine (nicotine e-cigarette) ne pouvait pas être plus efficace que les patchs dans le sevrage tabagique. Pour répondre à cette hypothèse, ils ont réalisé un essai randomisé contrôlé pragmatique de supériorité. Les premiers patients ont été enrôlés en 2011 et la dernière étape du suivi s’est clôt le 5 juillet 2013.

Ont été inclus 657 personnes souhaitant arrêter de fumer. Pour entrer dans l’étude, il fallait avoir plus de 18 ans et être fumeur d’au moins 10 cigarettes par jour l’année passée. Etaient exclues les femmes enceintes et allaitantes ainsi que les personnes prenant déjà un médicament du sevrage tabagique ou suivant un programme d’arrêt du tabac. Enfin, les infarctus, les accidents vasculaires cérébraux récents, les épisodes d’angine de poitrine étaient des motifs d’exclusion. Tous ces candidats au servage ont été randomisés en trois groupes : e cigarette avec nicotine (n = 289 ), patch (n=295 ) et e-cigarette placebo sans nicotine (n = 73).

Les patients sous patch recevaient un bon pour se procurer gratuitement le médicament en pharmacie, les sujets du groupe e-cigarette recevaient gratuitement le matériel. Tous avaient accès au même support éducatif par téléphone. L’objectif primaire de cette évaluation était le nombre d’abstinents six mois après le dernier jour de consommation de tabac, (auto-déclaration avec vérification du sevrage par mesure du CO exhalé).

Pas de miracle avec la e-cigarette

Comme souvent en médecine, on peut considérer les résultats sous forme d’une bouteille à moitié vide ou à moitié pleine. Côte vide, les chiffres montrent que le patch, comme la cigarette électronique obtiennent des taux de sevrage décevants à six mois : 7,3 % dans le groupe e-cigarettes avec nicotine ; 5,8 % dans le groupe patchs ; 4,1 % avec la e-cigarette placebo. Ces différences sont à la limite de la significativité. Autant dire que ce travail confirme qu’il n’est pas facile d’obtenir le sevrage tabagique et que la cigarette électronique n’est pas un outil révolutionnaire. Voici de quoi rabattre le caquet des publicitaires qui vantent à l’excès les mérites du vapotage.

Mais pas de signes d’alertes sur les effets indésirables

Côté bouteille à moitié pleine, on se réjouira que la e-cigarette soit à la mode Après tout, le vapotage est très probablement moins nocif que le tabagisme (une affirmation à vérifier avec le temps bien sûr). Dans cette étude les utilisateurs de cigarettes électroniques ont fait part de leur enthousiasme et ils étaient nombreux à accepter de recommander cette méthode de sevrage à leurs proches (88 % pour la e-cigarette avec nicotine, 92 % pour la e-cigarette placebo, 56 % pour les patchs. Autre élément positif, la surveillance à court terme n’a pas mis en avant d’événement indésirable important lié à l’usage de la cigarette électronique, comme dans le groupe patch d’ailleurs.

Cette étude est la 2ème de qualité évaluant la place de la cigarette électronique dans le sevrage. Elle nous incite à ne plus considérer la cigarette électronique comme une arnaque – ce qui a été le premier réflexe des médecins (dont nous reconnaissons le) – et ravive notre besoin de recherche. La e-cigarette nouveau moyen d’arrêt du tabac ? Alors Vu la faiblesse de notre pharmacopée pourquoi pas puisqu’au royaume des borgnes les aveugles sont rois. Et puis ne vaut t-il pas mieux être fashion victim que victime du tabac ?


Automesure©, Rédaction Dr Nicolas Postel-Vinay – Hôpital européen Georges Pompidou. Paris
Octobre 2013.  D’après Bullen Ch, Howe C., Laugesen M et al. Electronique cigarettes for smoking cessation : a randomised controlled trial. www.thelancet.com Published online September 7, 2013