Bague anti-ronflement
« Bague-anti-ronflement »: automesure.com vous déconseille d’acheter ce produit
Certaines pharmacies françaises vendent des « bagues anti-ronflements » de la marque ANTISNOR commercialisées par la société Beauclair Pharma. Ce produit n’est pas recommandé : allégations mensongères, non respect de la réglementation, publicité inappropriée. À éviter.
De la fausse acupuncture, aux allégations mensongères
Il existe très peu de publications scientifiques traitant des effets de l’acupuncture sur le sommeil. Il n’en existe aucune s’agissant des effets de l’acupuncture sur le ronflement et le sommeil. Il n’y a donc aucune preuve d’efficacité de la « bague anti-ronflement ». Ensuite, affirmer comme le fait le commerçant sur son site internet (visité le 18 avril 2012) que « la bague anti-ronflement AntiSnor est élaborée selon les principes ancestraux de l’acupression chinoise » est un amalgame grossier. Il faudrait croire que l’anneau va vraiment toucher un point particulier d’acupuncture et que l’effet est semblable à celui de l’acupuncture ; ce qui n’est pas le cas. Le site du fabricant (visité le 18 avril 2012) indique que la bague est une « solution novatrice [et] une méthode 100 % Efficace ». Cette affirmation d’efficacité à 100 % est tout simplement mensongère. S’agissant de cette indication, elle peut être qualifiée de publicité ou de pratique commerciale. L’article L 121-1 aliéna 2 du Code de la consommation indique qu’ « une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes : […] Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur […] Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, […] ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ». La publicité trompeuse est un délit pénal en France, passible de sanctions comme l’indiquent les articles L 121-3 et suivants du Code de la consommation. L’amende peut être portée à 50 % des dépenses de la publicité ou de la pratique constituant le délit. Par ailleurs, l’article L 5122-15 du Code de la santé publique (CSP) dispose que : « La publicité […] relative aux objets, appareils et méthodes, présentées comme favorisant le diagnostic, la prévention ou le traitement des maladies […] ou la modification de l’état physique ou psychologique […] peut être interdite par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé [(ANSM)], lorsqu’il n’est pas établi que lesdits objets, appareils et méthodes possèdent les propriétés annoncées. » De telles allégations sont donc également interdites par l’Agence qui veille au retrait d’une telle publicité.
Une vente en officine non conforme à la réglementation
La vente de ces bagues en pharmacie ne devrait pas avoir lieu car les pharmaciens ne peuvent faire, dans leur officine, le commerce de marchandises autres que celles figurant sur une liste bien précise arrêtée par le ministre chargé de la santé, sur proposition du Conseil national de l’ordre des pharmaciens (article L 5125-24 du Code de la santé publique). Cette liste des marchandises autorisées à la vente en officine est fixée par un Arrêté du 15 février 2002 (publié au Journal Officiel de la République Française (JORF) du 24 février 2002), complété par arrêté du 30 avril 2002 (publié au JORF du 4 mai 2002) et modifié par arrêté du 2 octobre 2006 (publié au JORF du 13 octobre 2006 (ces dispositions sont toujours valables en Avril 2012)). Dans son bulletin daté de Mars 2012, l’Ordre national des Pharmaciens a publié un article relatif à la vente de bijoux en pharmacie qui précise très clairement que les « bagues anti-ronflements », comme tous les « bijoux » revendiquant des propriétés médicales sont interdites de vente. Afin de pouvoir commercialiser ce produit en France sous le statut de « dispositif médical », la société exploitant le produit aurait du le déclarer à l’ANSM (anciennement Afssaps agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), agence de contrôle dépendant du ministère de la santé, et obtenir une autorisation.
Une publicité sur Internet inappropriée
Le public peut, en consultant le site de la société commercialisant la « bague anti-ronflement », rechercher le point de vente (une pharmacie répertoriée) le plus proche de leur domicile. Lors de la visite de ce site en mars 2012, il apparait que le résultat de la recherche n’est pas exhaustif comme pourrait l’être une recherche sur un annuaire. En effet, seuls quelques pharmaciens sont répertoriés selon les critères sélectifs propres à ce site. Or, la publicité des officines est réglementés et aux termes de l’article R 4235-30 du CSP : « Toute information ou publicité, lorsqu’elle est autorisée, doit être véridique, loyale et formulée avec tact et mesure ». La publicité doit donc être autorisée (elle fait l’objet d’une demande de visa et d’un contrôle de l’ANSM). Aussi, toute sollicitation de clientèle par des procédés contraires à la dignité de la profession ou ayant pour effet de porter atteinte au libre choix du pharmacien par sa clientèle, est interdite (articles R 4235-21 et -22 du CSP). En outre, l’article R 5125-29 précise qu’« un groupement ou un réseau constitué entre pharmacies ne peut faire de la publicité en faveur des officines qui le constituent. Aucune publicité ne peut être faite auprès du public pour un groupement ou un réseau constitué entre officines » et celle-ci n’est possible que dans les conditions fixées à l’article R 5125-26 du CSP. Dès lors, les conditions dans lesquelles cette information est délivrée auprès du public ne satisfait pas aux obligations déontologiques et légales auxquelles les pharmaciens sont soumis. En créant ces listes sélectives, les pharmaciens d’officine cités sont susceptibles de faire l’objet de plaintes devant le Conseil de l’Ordre des pharmaciens.
Des pharmaciens qui se discréditent
Le Code de déontologie des pharmaciens est formel (article R. 4235-10 du CSP) : « Le pharmacien doit veiller à ne jamais favoriser, ni par ses conseils, ni par ses actes, des pratiques contraires à la préservation de la santé publique. Il doit contribuer à la lutte contre le charlatanisme, notamment en s’abstenant de fabriquer, distribuer ou vendre tous objets ou produits ayant ce caractère. » pharmaciens qui proposent à la vente ce type de produits discréditent leur profession.
Dans ce cas précis, la vente de bijoux revendiquant des propriétés thérapeutiques est non seulement contraire à la réglementation comme on vient de le démontrer, (rappelons que les pharmaciens d’officine ont connaissance de la liste des marchandises qu’ils sont autorisés à vendre au cours de leur formation universitaire, le Journal de l’Ordre, le JORF, l’inspection de la pharmacie ou la presse professionnelle) mais engage la responsabilité et l’image de toute une profession aux yeux de la population. Comment faire confiance à des pharmaciens qui vendent à prix élevés (39,90 euros en avril 2012) un article qui n’apporte absolument aucune preuve d’efficacité ? Le ronflement peut être un signe de pathologie parfois sévère (le syndrome d’apnée du sommeil par exemple) et peut gêner au quotidien : un pharmacien qui, au lieu d’agir en professionnel averti et fiable s’improvise vendeur de bijoux effectue là un bien mauvais choix.
Rédaction Dr. Nicolas Postel-Vinay. Hôpital européen Georges Pompidou. Paris
Sources : code de la santé publique ; Bulletin de l’Ordre national des pharmaciens (mars 2012). Nous remercions Morgane Morey, juriste, et le Docteur Sylvie Royant-Parola, Présidente du réseau Morphée, membre de la société française de recherche sur la médecine du sommeil (SFRMS) pour avoir relu ce texte et nous avoir fait part de leurs suggestions. Commentaire rédigé le 3 Mai 2012.