Surpoids, obésité : informations pour les professionnels

Construire une consultation « surpoids/obésité » de premier recours

La HAS a émis en septembre 2011 des recommandations adaptées à l’adulte pour construire une consultation « surpoids/obésité » de premier recours. Nous publions ici un résumé de ce guide de bonne pratique. En France, 15 % des adultes souffrent d’obésité et 32% sont en surpoids. Les personnes qui souffrent de l’excès de poids ont du mal à identifier les bons interlocuteurs dans le système de soins. Les premiers de ces interlocuteurs sont les médecins traitants et les pédiatres.

Quatre axes

La prise en charge de l’obésité comporte quatre axes : prévenir la prise de poids supplémentaire chez les sujets en surpoids ou ayant une obésité ; prendre en charge les comorbidités associées et les répercussions psychologiques qu’elle provoque ; favoriser la perte de poids modérée et stabiliser le poids à long terme.
Ces recommandations indiquent également la conduite à tenir en cas de grossesse chez une femme en surpoids, ou dans le cas des personnes âgées. De nombreuses annexes pratiques aident à la mise en place de ces recommandations en consultation.
  La HAS rappelle qu’il est important de ne pas se baser sur le simple poids mais de mesurer la taille pour calculer l’IMC comme proposé automatiquement sur notre site automesure (depuis 1999 !). Il est recommandé de repérer systématiquement à la première consultation, puis régulièrement, le surpoids et l’obésité chez les patients et d’être particulièrement attentif à la tranche d’âge 25-34 ans, et aux personnes issues de milieux défavorisés (surtout pour les femmes). Pour un IMC entre 25 et 35 kg/m², la mesure du tour de taille doit également être faite étant donné le risque de diabète et de complications cardiovasculaires que représente l’adiposité abdominale par elle-même. La HAS souligne l’effet néfaste pour la santé des régimes dans la lutte contre l’obésité et met en garde contre l’effet yo-yo qui consiste à reprendre rapidement les kilos perdus pendant les régimes voir en prendre plus. Au-delà de 75 ans, le risque majeur lié au poids n’est plus l’obésité mais la dénutrition et/ou un surpoids qui peut masquer une malnutrition protéino-énergétique avec une importante fonte musculaire (sarcopénie).
La prise en charge repose sur une éducation thérapeutique diététique, sur l’activité physique et la sédentarité, ainsi qu’un accompagnement psychologique avec un suivi régulier et prolongé d’au moins deux ans. L’objectif pondéral vise une perte de poids de 10 à 15% qui assure une amélioration de la qualité de vie et des comorbidités et la stabilité du poids à long terme.


Prendre en compte l’impact des discriminations

Les personnes ayant une obésité sont victimes de nombreuses discriminations qui touchent toutes les dimensions de la vie. Il est recommandé que le médecin en mesure l’impact et prennent aussi en compte les préoccupations liées à l’image corporelle, l’estime de soi et la représentation de la maladie.
Le médecin traitant envisagera l’aide d’un professionnel de santé en deuxième recours en cas :
– de récidive après plusieurs régimes ou d’échec de la prise en charge de premier recours. L’échec peut être envisagé au bout de 6 mois à un an. Il pourra faire appel à un médecin spécialisé en nutrition ou un diététicien, à un psychiatre ou un psychologue clinicien, à un masseur-kinésithérapeute ou un enseignant en activités physiques adaptées ;
– d’IMC > 35 kg/m2 avec comorbidité et IMC ≥ 40 kg/m2 si demande du patient ou avis pour une éventuelle indication de chirurgie bariatrique.
– dans les troubles du comportement alimentaire caractérisés le recours au psychiatre ou au psychologue formé pour ces pathologies.
 

Femmes enceintes

Le médecin doit expliquer aux femmes enceintes qu’il n’est pas nécessaire de manger pour deux et que les besoins caloriques changent peu durant les 6 premiers mois de grossesse et augmentent modestement dans les 3 derniers mois. La prise de poids pendant la grossesse devrait être limitée à 7 kilos pour les femmes ayant un IMC ≥ 30 kg/m2. Toute prise de poids jugée excessive ou trop rapide doit conduire à un avis spécialisé.  


Source: Automesure.com® Références : Haute autorité de santé. Élaboration de recommandations de bonne pratique – Méthode « Recommandations pour la pratique clinique ». Septembre 2011. Rédaction Dr. Jocelyne Raison, Centre hospitalier Manhes. Fleury Mérogis, 91700 (Novembre 2011)

Les kilos en trop augmentent le risque de mortalité quel qu’en soit la cause

En suivant l’IMC de près de 1, 5 million d’adultes pendant dix ans, l’épidémiologie dessine une relation implacable entre surpoids, obésité et mortalité.

Le New England Journal of Medicine donne des chiffres assez frappants dans le cadre d’une étude épidémiologique menée à très large échelle et sur le long terme, ayant impliqué le National Cancer Institute et une douzaine d’autres Instituts de recherche du monde entier (1). Ils montrent que le surpoids accroit le risque de mortalité.
Les investigateurs ont rassemblé les données de 19 études prospectives soit 1,46 million d’adultes blancs non hispaniques, âgés de 19 à 84 ans et ayant un indice de masse corporelle (IMC) médian de 26.2. Au total, 160 087 décès ont été rapportés sur un suivi médian de 10 ans et 35 369 décès sont survenus chez des sujets considérés en bonne santé à l’inclusion (pas de cancer ou de maladie cardiovasculaire connu).

Les résultats montrent que les femmes en bonne santé à l’inclusion, qui n’ont jamais fumé et qui sont en surpoids (IMC entre 22,5 et 24. 9), ont un risque de mortalité modérément augmenté de 13 %. Le risque de mortalité augmente avec l’IMC : le risque de mortalité des femmes ayant un IMC entre 30 et 34.9 est augmenté de 44 %. Le risque de mortalité est augmenté de 88 % chez les femmes ayant un IMC entre 35 et 39. 9 et de 250 % chez celles ayant un IMC entre 40 et 49.9. Chez les hommes non fumeurs et en bonne santé à l’inclusion, ce risque de mortalité augmente pratiquement dans les mêmes pourcentages. En clair, aussi bien chez l’homme que chez la femme, le risque de mortalité augmente de façon linéaire à partir d’un IMC à 25 : pour chaque augmentation de 5 unités d’IMC à partir de 25, le risque de mortalité augmente de près de 30%.
Le risque de mortalité le plus bas est observé pour un IMC entre 20 et 24, prouvant ainsi la justesse des définitions de l’IMC normal selon l’OMS. Il existe aussi une surmortalité chez les sujets ayant un IMC plus bas (IMC 17.5) de 37%. Sur cette large population, il a été possible d’étudier les effets de tels ou tels facteurs sur la relation IMC mortalité : le risque de mortalité augmente en fonction de l’IMC, à partir de 25, dans tous les sous-groupes, quelque soit l’âge, le niveau d’éducation, le niveau d’activité physique et est encore plus élevé chez les sujets ayant un IMC > 25 avant 50 ans. Il a été également possible d’éliminer les biais liés à l’effet du tabac et des maladies préexistantes qui ont tendance à sous estimer l’intensité de la relation IMC – mortalité toutes causes confondues et d’étudier précisément la cohorte de sujets non fumeurs et indemnes de maladies à l’inclusion. En conclusion, cette étude confirme que le surpoids et l’obésité, chez l’adulte blanc, augmente de façon indépendante et forte la mortalité toutes causes confondues.

Références :

  1. Body-Mass Index and Mortality among 1.46 Million White Adults. N Engl J Med 2010;363:2211-9.