Automesure tensionnelle : une enquête montre que les généralistes français n’y ont pas assez recours faute de temps et de formation

 

Les patients hypertendus utilisent de plus en plus l’automesure tensionnelle, mais cet outil incontournable du diagnostic et du suivi des patients hypertendus tarde à s’installer chez les médecins généralistes français.  Pour identifier les facilitateurs et les obstacles à la généralisation de l’automesure par les généralistes, le Pr Jean Marc Boivin (Nancy) a conduit une étude explorant la perception de l’automesure chez les médecins généralistes dans leur pratique quotidienne. En voici le résumé : 
Cette étude qualitative comprenait la constitution de six groupes d’échanges réunissant  en tout 41 médecins spécialistes en soins primaires en Lorraine (Nord-Est de la France). Elle  a été menée entre octobre 2016 et Février 2017.  Les entretiens ont été anonymisés et intégralement retranscrits puis une analyse thématique et exhaustive a été réalisée.Les résultats montrent que les premières raisons invoquées par les généralistes pour expliquer leurs difficultés concernant l’automesure étaient le manque de temps, de ressources matérielles et humaines. Cependant, tous ces motifs masquaient d’autres facteurs limitatifs importants, notamment l’insuffisance de connaissances concernant l’automesure, la faible adhésion aux recommandations, et la crainte de perdre  en quelque sorte, une partie de leur « pouvoir médical ». Les médecins interrogés  ont admis cependant que l’utilisation de l’automesure pouvait améliorer l’observance des traitements par les patients et diminuer l’inertie thérapeutique du soignant. Toutefois, la plupart des médecins utilisaient l’AMT seulement au moment du diagnostic et rarement pour le suivi. Une explication à la réticence des médecins à l’égard de l’automesure, en plus de celles qui concernaient les recommandations, était que l’AMT était perçue comme contraignante et difficile à mettre en œuvre chez les patients. Cet obstacle était principalement observé chez les omnipraticiens les plus âgés mais moins fréquemment chez les jeunes médecins, principalement ceux qui exerçaient dans des centres de santé multidisciplinaires, car la barrière logistique n’était plus la même. En conclusion les auteurs de ce travail estiment qu’il est nécessaire de se concentrer sur la formation des médecins et l’éducation des patients. Nous devons également mettre fin au « pouvoir médical » dans la prise en charge de l’hypertension et nous tourner vers les soins multidisciplinaires, incluant les infirmières, les pharmaciens et les patients.


Pr Jean-Marc BOIVIN Médecin Généraliste Professeur des Universités Université de Lorraine 54500 Vandoeuvre-lès-Nancy Source automesure Rédaction : Octobre 2019